Tentant d’oublier le rap game, MacFly séjournait dans un monastère thaïlandais. Mais une rumeur enflait et l’info circula jusqu’au royaume asiatique : c’était le feu au bout du lac Léman et la production genevoise explosait la concu’. Intrigué, il voulut en savoir plus et regagna la Suisse en tank. Quelques jours plus tard, 5 titres clipés lui pétaient à la gueule…

A’s – GLCSDC
Un clip en plein jour pour un homme de l’ombre. Mode de vie… béton nocturne. Normal pour un artiste batmobb aussi insaisissable que la « souris-chauve » de Gotham. On entendait souvent dans le rap, sous forme de punchline, qu’un tel ou untel était le « rappeur préféré de ton rappeur préféré ». A’s est un rappeur pour les rappeurs avec à la clé des liens, des références à foison et un langage crypté. Il ne touchera sûrement jamais le public de Bigflo et Oli mais à vrai dire, il doit s’en foutre royalement. Rien que pour l’entendre dire « Que devient Memphis sans le khey (Young Dolph !) ? », « J’me fais rarissime comme O’Rosko » ou « J’ai assaisonné le risotto », GLCSDC en valait l’attente. 


Mairo – M.A.I.R
Une rue éclairée au lampadaire, une prod des ténèbres et deux minutes pile. Mairo réunit tous les éléments pour sublimer le freestyle ravageur et rappeler combien le game (retour dans le temps ici) genevois peut-être musclé, accompagné de la lune au zénith. C’est d’ailleurs lui qui entame le clip par une série de push-ups qui pourraient très bien tenir lieu d’avertissements adressés aux opps: il faudra taffer vos rep’. Deux lignes plus loin, une caresse dans le sens du poil pour une mandale en retour: « Les blagues sur la couleur de peau quand t’es enfant, c’est bon enfant/mais là t’es un adulte, ta mère la p*** ». Celui qui se décrit comme un mix entre « le smile à Lily Allen » et « les nattes à Iverson Allen » a encore de belles nuits devant lui.


OG Brax – Cœur & Ego
« Si le globe part en couilles, c’est pas de la faute aux négros ». Le OG revient aux racines du mal avec un titre en forme de devoir de mémoire rappelant les origines de l’esclavage, l’expansion coloniale européenne au début du siècle dernier ou encore les « villages nègres », véritables zoo humains et instruments de propagande d’un passé pas si lointain… Camisole de force à l’appui, direction opposée à la vision proposée par la société: tout porte à croire qu’être noir en 2022 relève toujours d’un numéro d’équilibriste consistant « à viser l’œil du cyclope en surfant dans l’œil du cyclone ».


Rox – Entendu.e ?
Quasi un an après la sortie de VISITE RIMEE partie une chroniqué ici-même, la moitié du D.U.O. revient avec Atterrissage. Un EP trois titres dont est extrait « Entendu.e ? ». Un morceau brassant des thèmes forts, habituellement réservés à… pas grand monde en fait. De nos jours, peu rappent les questionnements, les sentiments ou la construction de soi. Non seulement c’est bien écrit : « La musique, un phare/ des bateaux échouent dans la lumière/Pas d’autre choix, elle nous tient en joue dans sa lunette », mais le titre évite également de tomber dans la moralisation. Rox nous gratifie au passage d’un storytelling de quelques mesures rappelant combien l’exercice manque au rap en français.


DI-MEH – Nonante-huit feat. Mairo
Deux s(ai)eigneurs à qui vont tous les honneurs sur quelques notes de piano éparses. Un titre abouti, tant au niveau de la DA du clip (le noir et blanc leur va si bien), que de la prod’ ou de l’ambiance posée mais pas sereine pour un sou. Di-meh y évoque l’année du sacre de Zizou et peut-être celle du rap, avec ses épellations et ses abréviations en guise d’introduction. Mais ce n’est pas tout. 2ème sélec’ pour Mairo et ses phases IRL : « Un schlag, on s’croise les regards/J’le vois, il m’voit/au moins on se froisse les molaires ». On le savait faire des références à Maître Gim’s, il peut aussi en faire à Salvador Dali. Après ce « 98 », il pourrait très bien quitter ce rap de merde sans regret. Merci Hatik.