Erikson – American Dream (EP)

Une nouvelle semaine débute et c’est l’occasion pour moi de vous présenter un nouveau projet, en l’occurrence celui d’Erikson. Le petit nom du bébé est « American Dream » ou rêve américain. Autant dire que le nom présage d’une inspiration outre-Atlantique.
Mais ouvrons la boîte et appuyons sur play. 9 titres composent cette galette. 9 producteurs pour les beats, un MC, et des featurings pour le soutenir. Et pas de surprise, l’atmosphère est américaine en grosse majorité, et quand je dis américaine, la partie sud du continent a droit à son petit clin d’oeil. Le rendu est très mainstream, musicalement taillé pour le club. La diversité de producteurs n’enlève rien à la cohérence à l’écoute d’American Dream, et les titres s’enchaînent sans problème. Concernant les thèmes abordés, beaucoup d’egotrip, de postures légèrement thug, ainsi que l’évocation des racines, et bien entendu, les ambiances club. Certaines phases sont tantôt drôles tantôt borderline et ne laissent en tout cas pas indifférent.
Concernant le flow du MC, on a affaire à ce genre de rappeur dont on ne sait que penser. Souvent hors temps, pas toujours en rythme, finalement on se demande si le charme de certains morceaux n’est pas exacerbé grâce à cette particularité. Les refrains chantonnés par le MC dans le mauvais ton amèneront à 2 options : soit on détestera, soit on trouvera génial ce genre d’effort, voire même stratosphérique, comme un morceau de bravoure. Mais là encore impossible de rester neutre face à ce genre de phénomène.
Mais passons en revue les morceaux :

Final call : Ambiance clair-obscur et beat lourd, mainstream, cette entrée en matière musicale est très plaisante, avec un puzzle de mots et de pensées (merci Booba) qui présente bien le projet. La phase la plus marquante « j’aime la Suisse, la raclette et la fondue ». Oui, ça a l’air drôle, mais en filigrane on dénote une aversion pour ce qui fait le reste de la Suisse : son gouvernement. Light la phase ? Pas tant que ça au final.

Anarchy : Comme son nom l’indique, le morceau part dans tous les sens sur une prod laid back aux caisses claires qui claquent fort. Le flow toujours traînard rate parfois le coche, posé de manière anarchique. Lyricalement, c’est raccord avec le titre, avec quelques passages qui attirent l’attention, notamment la phase « le fisc et moi on s’entend pas comme Cauet et Arthur ». Le refrain montre le caractère désinvolte du rappeur, avec un egotrip deviant. Le tout donne un morceau calibré US pour les clubs. Tout en se disant que dans la langue de Moliere, le charme est un peu diminué.

KOD : Sans doute l’ovni du projet, un morceau proprement barré avec une boucle « Hughes Aufray » sur le beat et un refrain fredonné totalement faux sur l’air de « Santiano ». Une escapade dans laquelle l’egotrip et l’atmosphère débauchée se rejoignent dans un trip qui doit nous emmener à Miami. Matérialisme, arrogance, le cocktail est totalement fou. Mention spéciale au refrain qui est complètement délirant, et qui personnellement m’a fait bien rire.

Vamos : Ambiance sud-américaine chaleureuse, Erikson nous lance un appel à la fête et à la danse. Un titre léger et dancefloor avec Nassi en soutien au refrain chanté très efficace pour amener un peu de soleil à l’automne déjà bien installé. Invitation en boîte pour ambiance caliente. Une très bonne track. Le flow est d’ailleurs mieux maîtrisé ici.

Liqueur : Erikson nous parle ici de ce penchant pour les « eaux chaudes », qui fait oublier les problèmes du quotidien. Le beat est efficace et dans la même veine que les précédents. Lyricalement, c’est plutôt moyen, et le flow ne laissera pas un souvenir impérissable. Le refrain est peut-être un peu lourd à écouter. En bref pas le meilleur morceau.

Zoo : Street anthem au beat lourd avec pour épauler Erikson, Boula-Z et Intenso. Ce dernier lui renvoie la balle après l’avoir invité sur « Asian Food » (chroniqué précédemment). Description de la vie dans la jungle urbaine, critique des « comédiens de rue », les rappeurs se lâchent. Malheureusement, les feat prennent toute la place et Erikson est poussé au 2e plan. Mention spéciale à Intenso, avec un flow tranchant sur un couplet qui donne sa dimension au morceau.

Mal du pays : Ce morceau est le parfait exemple de ce qui a été abordé précédemment. Un beat plutôt bon, et un refrain chanté faux du début à la fin dont on ne sait pas si l’on doit s’offusquer ou crier au génie tellement c’est marquant. Le thème ici n’est pas des plus joyeux. L’envie de retrouver ses racines éloignées, tout en décrivant une vie pauvre ici. Un morceau au sujet touchant, mais à la forme qui peut laisser perplexe.

Scred love : On passera très rapidement sur ce son à l’intérêt moindre malgré un beat plutôt cool…

Globetrotter : Sample soul doux et relax pour le thème du voyage. Le rappeur nous conte ses envies d’ailleurs, avec un meilleur placement faisant honneur à l’instru au solo de guitare qui ravira les fans de blues. Un sympathique morceau en apesanteur pour clore ce rêve américain.

Cet « American Dream » peut se targuer d’avoir des instrus bien choisies, mais les carences rappologiques du MC et un flow parfois trop moyen peuvent déconcerter, et les feats mettent l’acteur principal au second plan. Auront du mal les auditeurs amateurs de technique et fuiront systématiquement les puristes. Difficile de rentrer dans le délire quand on n’a pas de second degré. Mais les morceaux de bravoure comme les refrains chantés faux feront littéralement tripper dans cet univers barré.
Bref, mi-figue mi-raisin, mais difficile de rester totalement neutre comme un suisse devant cet EP. Toujours est-il qu’Erikson est un ovni, et que la pépite est ufologique.

Par Mr Dillon