Le Soudan du Sud fait parler de lui ces derniers jours mais ce n’est pas parce qu’on se décide enfin à comprendre la situation ou à tenter de réparer les torts causés par des décennies de colonialisme. Non, c’est simplement parce que son équipe de basket olympique dépasse toutes les attentes. Une attention soudaine qui a incité Tonton Colt à consacrer un TCDT à cette région du monde.

Dévasté par des décennies de conflits internes et de crises politiques, le Soudan est un exemple frappant des conséquences désastreuses du colonialisme. On nous dit souvent que la situation est complexe et qu’il faut du temps pour tout comprendre, alors que finalement, ça tient en un mot : colonialisme. Avec ce TCDT, Tonton Colt va essayer de vous expliquer ça le plus simplement possible, pour comprendre sans avoir besoin d’y passer la journée.

Le Soudan a été colonisé par les Britanniques et, comme tous les bons colons, ils ont mis en place diverses stratégies pour s’assurer un pouvoir absolu sur la région et les différentes populations. Pour commencer, la base : diviser pour mieux régner. Eh oui, si tu parviens à faire en sorte que les populations locales se détestent, elles se battront entre elles et te laisseront tranquille. Au Soudan, les Britanniques ont systématiquement favorisé le Nord au détriment du Sud, créant délibérément les disparités économiques et sociales les plus flagrantes possible, voilà pour le premier niveau de division : Nord contre Sud. Mais comme cela ne suffit pas, ils ont alimenté des tensions et des ressentiments au sein même de ces deux populations, et ce sur le long terme. Pour cela, ils ont mené des politiques d’assimilation culturelle et de domination religieuse afin de bien creuser le gouffre entre les communautés et attiser au maximum les haines. Voilà, maintenant, le pays peut être pillé sans trop se faire de soucis, sauf peut-être pour aa conscience… mais bon, quelques donations aux bonnes oeuvres et ça devrait expier tout ça. Et si vraiment ça commence à sentir le roussi, il suffit de se barrer en grand prince, en offrant l’indépendance par exemple, mais sans oublier de mettre et de maintenir un groupe au pouvoir. En plus ça permet de vendre des armes aux gouvernement et aux rebelles, perpétuant ainsi les cycles de violence et de haine mis en place dès le début du plan. À côté de ça, les ex-colons peuvent continuer de piller tranquillement les ressources (ici pétrole, or, chrome, mais aussi eau), en plus comme ce n’est plus vraiment eux aux manettes, tout va bien, l’argent entre tout seul. Bon ils ont quand même envie de continuer à être considéré comme des sauveurs alors de temps en temps ils font un peu d’humanitaire pour la forme, c’est toujours bien vu de sauver des civils non ? Et s’il venait l’idée saugrenue à un gouvernement d’essayer de briser ces cercles vicieux et de redonner le pouvoir au peuple, les structures politiques et administratives centralisées mises en place durant la colonisation empêcheraient tout développement d’une gouvernance adaptée aux réalités du pays. Non vraiment, y’a pas à dire, le job a été bien fait.

Alors oui, il y a bien eu quelques tentatives depuis l’indépendance du pays en 1956, mais on vient de le voir, ça ne fait pas partie du plan de laisser le peuple prendre ses aises. Alors en 1989, el Béchir prend le pouvoir par un coup d’État militaire et il ne le lâchera qu’en 2019 après des mois de manifestations. Enfin, lâcher c’est vite dit, c’est l’armée qui a pris le pouvoir. En 30 ans de règne, el Béchir et son régime ont été impliqués dans plusieurs conflits internes, dont le plus « connu » est la guerre civile au Darfour débutée en 2003 et dont les atrocités et déplacements massifs de populations ont valu à el Béchir un mandat d’arrêt en 2009 de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité et un autre en 2010 pour génocide. Un digne héritier des leçons de pouvoir des colons… 
En 2005, il signera un accord de paix avec le SPLM qui aboutira au référendum d’indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais comme on l’a vu plus haut, les Britanniques avaient vraiment bien fait leur boulot de division, et donc cette indépendance a été suivie par une guerre civile de 2013 à 2018. Un accord entre les belligérants a été conclu en 2020, et maintenant le Soudan du Sud peut présenter une équipe de basket compétitive aux JO de Paris et tout le monde se dit que tout va bien, que le monde est merveilleux. Et s’il ne faut absolument pas éteindre cette lueur d’espoir et de fierté offerte à un peuple, il est crucial de ne pas oublier et de se rappeler. 

Au Sud, les violences intercommunautaires et les affrontements armés pour le contrôle des ressources, de la terre et du bétail continuent, des millions (oui des millions, genre la population de la Suisse) de réfugiés ont besoin d’une aide alimentaire pour survivre. Au Nord, la reprise des hostilités entre l’armée (FAS) et le FSR en 2023 a déjà tué plus de 150 000 civils et mis plus de 11 millions de personnes sur les routes de l’exil. Des rapports indiquent que des nettoyages ethniques et des crimes contre l’humanité ont été commis par les forces paramilitaire, la situation est telle qu’une évolution vers un génocide semblable à ce qu’a connu le Rwanda n’a jamais été aussi grande.
Alors oui, les victoires sportives peuvent servir de catalyseur pour un avenir meilleur, mais plutôt que de se contenter de cet éclat éphémère, il faudrait surtout que les anciens colons assument leurs responsabilités et s’engagent réellement à soutenir de véritables initiatives de développement et de réconciliation afin que cesse les massacres de civils.

Tonton Colt