Pour la première soirée de sa 34e édition, le Chapiteau du Cully Jazz a pris son envol pour un voyage musical aux mille facettes.

Soirée d’ouverture. Soirée de voyage. Alliance subtile, entre hip-hop, soul et sonorités africaines, portée sur scène par la Suissesse d’origine malienne et sénégalaise Thaïs Diarra. L’ouverture du moment annonce la couleur des harmonies du soir. Complicité des influences. Union du meilleur des univers intercontinentaux.

La deuxième escale porte le drapeau cubain. Ibeyi. Duo de jumelles au métissage culturel. Cuba, Venezuela. Univers qui emprunte à ces deux terres. Univers saupoudré de contemporain. Douceur, subtilité et rythmique délicate, agrémentée d’une force de proposition rafraîchissante. Deux sœurs ancrées dans leur racine, deux sœurs qui, dans une fusion unique, portent ces racines sur scène avec respect et talent. Leurs voix ne font plus qu’une pour créer une harmonie pure, précise et naturelle à la fois. Une harmonie maîtrisée, qui vogue entre précipitation et balade. L’escapade scénique d’Ibeyi charme l’audience. Rien d’étonnant quand le talent se manifeste.

Escale finale, saveurs orientales. Hindi Zahra. L’entretien de l’après-midi avait suggéré l’ampleur de la sincérité de l’univers de la musicienne marocaine (interview à découvrir demain). Sur disque, elle manifeste sa volonté de partage avec douceur vocale. Elle allie subtilement et respectueusement la mixité des influences qui font son essence. On y croise du jazz, de la soul, de la bossa, du blues, de la folk et, en subtile insinuation, ces racines orientales qui l’ont vu naître. Un mot marque l’esprit : transe. Rythme 6-8, d’abord évoqué, puis affirmé. Dans une osmose délicate, Hindi Zahra et ses musiciens emportent l’audience dans cette transe qui est la leur. Tout commence avec « To The Forces ». Texte sur les populations qui vivent loin de la civilisation. La douceur des vocalises du disque prend du poids et dévoile une cassure, une férocité nécessaire pour emporter le public dans sa transe. Pari réussi. La constance de l’intensité des fusions harmoniques tient le public dans une fascination sans faillie. 6-8 porte la transe. L’univers aux mille reflets envoûte, alors qu’Hindi Zahra conte ses histoires en français, arabe, berbère, anglais. Universalité dévoilée, vocalises entre ornements jazz et orientales. Le rappel fait la part belle à cette volonté d’abolir les frontières musicales. « The Moon », son tapis reggae, vibrato venu d’ailleurs. Point final du soir. « Cabo Verde ». Ici encore, cette transe. Une transe aux influences du monde. Chant berbère, chant darija, chant anglophone. Rythmique Cap-Verdienne qui se métamorphose délicatement pour rejoindre les contrées tagnawit. Profondeur, déroutement salvateur. La force de proposition d’Hindi Zahra prend toute son ampleur dans la puissance de cette fin de soirée. « Cabor Verde » cristallise tout le spectre du message musical de l’artiste et de cette soirée au Cully Jazz. Fusion des styles, union des cultures. Pour ne retenir que le meilleur.

par Sophia