Quelques mois et deux albums, voilà ce qu’il aura fallu aux deux frères Ademo et N.O.S pour devenir le nouveau phénomène de la scène rap française. En tête des ventes digitales sur iTunes avec « Le monde Chico », PNL enflamme les réseaux sociaux et la presse s’emballe, parlant du début d’une nouvelle ère pour le rap français. Mais si tout le monde parle des deux frères des Tarterêts, eux restent très discrets, cultivant le secret et refusant toutes demandes d’interviews. On ne sait donc pas grand-chose d’eux et c’est peut-être aussi là que réside une grande part de leur succès.

Tout débute en mars de cette année avec leur premier album « Que la famille », on pense alors à « Only the Family » de lil Durk, hommage ou simple traduction ? La question ne se pose pas encore, PNL n’a alors rien d’un phénomène. Tout commence réellement avec la mise en ligne au mois de juin du clip « Le Monde ou rien » (extrait de « Le monde Chico ») tourné dans le quartier de la Scampia à Naples et dans leur cité des Tarterêts. Plus de 10 millions de vues sur YouTube, la machine est lancée, les journalistes peuvent alors commencer l’analyse du phénomène. Et si le titre de leur premier album permet un rapide rapprochement avec Chicago, la blogosphère ne s’en satisfait pas, tout chez PNL est alors soigneusement analysé, décortiqué à la manière des critiques d’art contemporain, le silence des deux rappeurs ne fait qu’accentuer le tout, la nature a horreur du vide, les journalistes aussi alors ils brodent, décryptent les paroles, la façon de s’habiller, les coupes de cheveux… PNL ne s’appartient déjà plus, il est devenu un mythe et à force d’entendre tant de louanges on commence à douter. Pourtant ils avaient réussi à nous accrocher, eux le premier groupe de rap français à véritablement maîtriser l’auto-tune, l’utilisant enfin comme un instrument, adaptant leurs flows et leurs textes à des prods glanées sur internet. PNL nous emmenait en français là où seuls les ricains pouvaient le faire, nous faisant oublier les textes pour mettre en avant une certaine atmosphère qui sera retranscrite dans leurs clips. On se disait que pour la première fois un groupe français avait réussi à parfaitement digérer les nouveaux codes venus d’outre-Atlantique, du cloud rap à la drill de Chicago, le rap français nous montrait enfin qu’il pouvait être triste sans utiliser des samples de pianos déjà trop entendu. Mais voilà, on a vite oublié tout ça, Future sortait un nouvel album, la maître avait parlé, on était passé à autre chose et à vrai dire on avait même presque oublié que PNL existait… jusqu’à la sortie de l’album « Le monde Chico » qui en quelques jours allait affoler les compteurs. L’emballement est total, tous semblent s’accorder pour dire que PNL va transformer le rap français. On reste sceptique, cette vieille habitude tenace qui veut que l’on peine à apprécier le rap qui plaît à ceux qui généralement n’aiment pas le rap. On se dit que tout cela va trop loin, alors on reprend tout depuis le début, clips et textes, car l’image et le son ne font qu’un chez PNL. Les clips sont beaux, les décors jamais choisis au hasard, on se perd dans les images, on se fait balader, mais voilà tout est presque trop propre, trop léché, on se rapproche de Fauve mais avec le côté caillera dans les textes et l’attitude, les bobos vont se régaler, ils vont pouvoir taquiner le côté obscur en version romantique, la mélancolie et le mal-être qui vont avec, un petit plaisir coupable somme toute. Musicalement, tout est très bien fait aussi on l’a déjà dit, les codes du genre sont parfaitement respectés et en ce sens PNL fait le taff, mais de là à parler de génie… les oreilles attentives auront reconnu des phases, des gimmicks voir même des bouts de texte de rappeurs US…
Au final PNL ne fait que se réapproprier un savoir-faire d’outre-Atlantique, mais que les choses soient clair, ils n’ont rien inventé et s’il est quasiment certain qu’ils vont lancer une nouvelle mode dans le rap français alors ce sera à la française, en suivant avec un peu d’avance sur les autres ce qui se fait ailleurs. Leur seul mérite étant d’être les premiers à bien le faire, un peu à l’image de Booba. Et s’il ne pouvait y avoir qu’un Booba, il n’y aura qu’un PNL, mais on est encore loin d’une nouvelle ère car il n’y avait qu’un dj Mehdi.

par Mr Seavers pour juice.de