Il faut du temps et plusieurs écoutes pour véritablement apprécier le premier album solo de Neka « Noir Corbeau » à sa juste valeur. En effet, fidèle à lui-même et à la réputation qu’il s’est construite depuis les années 90, Neka nous livre ici un condensé de ses aptitudes tant à l’écriture que derrière le micro ou les consoles. Car si vous ne la saviez pas encore, Neka touche à tout et ça lui réussit plutôt bien comme nous le prouve sa discographie, que ce soit avec le S1’Drom et les Inglourious Bastardz, ou ses nombreuses activités au sein du collectif Rootscore. Mais avec « Noir Corbeau », la donne est un peu différente puisqu’il s’agit de son premier album solo, une pression d’un genre nouveau pesait donc sur les épaules de Neka qui allait devoir répondre aux nombreuses attentes d’un public qui attendait beaucoup de lui, particulièrement après le très bon projet d’Inglourious Bastardz.
Fidèle au rendez-vous, Neka nous offre à travers ses 19 morceaux des textes dont il a le secret, mêlant (très) habillement les (très) nombreuses références culturelles et les effets de style qui font presque toujours mouche, parfois avec un peu de retard, le temps pour l’auditeur de comprendre de quoi il en retourne, le prix à payer lorsqu’on a affaire à un mc qui maîtrise ses sujets et qui les utilisent pour illustrer ses propos. On apprécie, les « punchlines métaphoriques » c’est quand même autre chose que les punchlines « yo mama »… Neka est un enfant des années 90 et ça s’entend, l’amour des mots est resté, tout comme une certaine idée du rap et de son utilisation. Toujours dans la même veine et parce que Neka reste avant tout un homme de collectif, « Noir Corbeau » se différencie des autres albums par les diverses collaborations tant au niveau des prods que des mcs invités à poser avec lui.

On retrouve logiquement Menshen, binôme de Neka au sein du S’1drom, sur le très bon « Enfoncer les portes », duo qui devient quartet sur « Pour une poignée de francs suisses » avec Amanite et M.Etik. Une découverte en la personne de Graindsable sur « C’est parti de rien », mais aussi les routiniers M-Dot sur « Let it go » ou encore Koma et 10Vers sur « 3 fois rien », mention spéciale pour le « mc qui portait bien son blaze sur cette track » Abrazif pour « Peu d’amis ». Au niveau des prods, on retrouve bien entendu Neka mais aussi les Kids Of Crackiling, Mani Deïz, Nizi, Lyrikal Record, Hell Gordo, Supervillain ou encore El Gaouli. Une diversité qui se ressent tout naturellement dans l’écoute de « Noir Corbeau » qui même s’il reste très sombre est plutôt varié, passant du boom bap classique aux samples de guitare sans oublier quelques prods très aériennes.

Si l’on devait résumer « Noir Corbeau » en quelques mots, on vous dirait que Neka survole les 19 titres dans lesquels il rappe. Toujours à son meilleur il ne se laisse jamais dépasser par ses invités et impose son style avec force et finesse. Parfaitement conscient de ses capacités, il a su parfaitement choisir les écrins mettant son rap et sa prose en valeur. Une réussite pour un premier album solo mais on n’en attendait pas moins de la part de Neka. Et parce qu’il est encore temps, vous pouvez sans plus attendre le commander pour Noël, tous les liens se trouvant sur rootscore.org.