L'Interview d'Orelsan Au Festi'Neuch

Samedi soir c’est Orelsan qui débarquait sur les bords du lac de Neuchâtel pour le 2e concert de sa tournée d’été. Arrivé sur place on nous informe qu’il ne donnera aucune interview, déçu, mais pas résigné on sent qu’on fera quand même l’interview. Le hasard faisant bien les choses, et alors qu’on s’apprête à aller manger un petit quelque chose, on croise l’artiste. On va donc le saluer, on s’entretient avec lui et après quelques instants il nous donne rendez-vous un peu plus tard, c’est ce qui s’appelle une interview exclusive. Impossible n’est définitivement pas repreZent en ce Festi’Neuch.

 

 

 

 

 

Est-ce que tu te souviens de ta première rencontre avec le Hiphop ?
Alors ça devait être un groupe comme… (il réfléchit) non, en fait la première rencontre ça doit être Benny B… c’était quand même un gros truc, je me rappelle quand on était des gosses… ils sont arrivés, ils avaient un style à part, y’avait des parties dansées, y’avait du rythme, ça a fait un gros carton à l’époque en France. Donc je pense que c’est ça le premier truc rap qui m’a marqué… on trouvait ça cool, on était des gosses et on s’amusait à essayer de refaire les chorés. Après c’est pas ça qui a fait que je suis devenu un passionné de rap, mais je réécoutais y’a pas si longtemps en fait et y’avait vraiment un bon délire derrière le truc… Voilà, pour moi c’est ça mon premier souvenir rap.

Le premier morceau de rap qui t’a touché ?
C’est difficile de répondre, j’ai du mal à remettre ce genre de chose dans l’ordre chronologique. Quand je devais avoir environ 12 ans, je faisais du basket, mes potes du basket ils me disaient « les basketteurs ils écoutent du rap. » Et moi je répondais que ce que j’aimais bien c’était AC/DC, Iron Maiden, Nirvana… et les mecs insistaient, me disaient qu’il fallait que j’écoute du rap, donc ils ont gentiment commencé à me faire écouter du rap, ils ont dû commencer avec du Alliance Ethnik, c’était un gros carton à l’époque, je me souviens que j’avais acheté le 2 titres, j’apprenais les paroles par coeur… après c’était les classiques, NTM, Iam, on m’a aussi offert un album de Nas… et là j’ai commencé à me passionner pour le truc, j’achetais les magazines… C’est con, mais quand t’es petit tout va vite, mes potes m’ont dit d’écouter du rap et en 2 ans j’ai commencé à vraiment écouter ça sérieusement. Quand je devais avoir 13-14 ans y’a le grand frère d’un pote qui m’a refilé toutes les cassettes de Public Enemy, jme suis vraiment intéressé au truc et c’est devenu une passion. Je réécoutais les albums dont j’étais passé à côté, Les Sages Po, La Cliqua, etc. Mais je ne pourrais pas te sortir un titre en particulier, c’était une période faste pour moi !

Pour toi, qu’est-ce que c’est le Hiphop ?
Pour moi Hiphop au sens propre c’est les 5 éléments et encore on pourrait en mettre plus maintenant… C’était un style de vie, mais pour moi le Hiphop ce n’était pas quelque chose qui m’a vraiment touché. Le rap oui, depuis que j’ai 15-16 ans je rappe, j’ai toujours été fan de rap. Après le Hiphop en lui même ce n’est pas quelque chose qui me parle vraiment. Le graffiti je n’y connais rien, j’y suis insensible (rires), la danse j’aime bien, mais pareil, je n’y connais rien, pareil pour le djing, tout ce qui est technique j’y connais rien. Donc pour moi Hiphop c’est plus ce qui touche à la musique hiphop, c’est vraiment la musique qui m’a parlé et m’a fait découvrir des choses.

Justement, qu’est-ce que le Hiphop a apporté dans ta vie ?
Pleins de choses, mais une fois de plus ici je te parle de la musique et l’écriture. Ça m’a apporté un hobby, une passion. À la base j’étais aussi beatmaker, du coup c’était vraiment ma passion donc forcément j’ai commencé à écouter d’autres musiques pour m’intéresser donc je me suis cultivé… et quand tu écris tu commences à apprendre sur toi-même et puis tu te dis « hey, mais j’écris, faudrait que j’essaie de lire des bouquins »… Donc moi ça m’a tout apporté, franchement ça m’a tout apporté. Aussi le fait d’être en communauté tout le temps, on se retrouvait toujours à être 10-12, être avec les gens avec qui l’on rappait, au final ça t’apprend aussi à vivre en communauté donc à revenir aux bases du Hiphop… havin fun etc.

En parlant d’écriture, est-ce que tu te souviens de la première rime que tu as écrit et dont tu étais fier ?
Pfffff… c’était vraiment de la merde comme elles étaient pourries mes premières phases… Mais j’étais déjà un peu fier d’être capable d’écrire parce qu’à la base je faisais beaucoup d’impro, surtout des impros bourré donc c’était ça mes textes… mais je sais même plus exactement ce que je racontais, sérieusement c’était vraiment nul… la première dont j’étais vraiment fier il a fallu attendre, même si j’ai toujours été content de montrer ce que je faisais. Mais la première dont je suis vraiment fier je n’arrive pas à me rappeler… le truc c’est qu’à l’époque quand je commençais à rapper y’avait pas trop de punchlines, c’était pas du rap de punchlines comme maintenant. C’est venu après donc au début j’écrivais des trucs super bateaux du genre « jsuis pas beau gosse comme Brad, jsuis pas fort comme un Pitt »… (rires) c’était plus des jeux de mots avec des assonances que des phases… les punchlines c’est venu après.

L’interview est pour repreZent.ch, du coup j’ai envie de te demander si tu penses que ce mot a encore lieu d’être en 2013…
Pour moi oui. Je m’en rends compte de plus en plus. Quand je suis arrivé, au début pour moi ce que je racontais ça ne parlait à personne… c’est pour ça que je voulais pas trop rapper au début parce que je racontais vraiment des trucs banals de la vie de tous les jours. Et puis petit à petit des gens sont venus me dire qu’ils se reconnaissaient dans ce que je disais. Pour moi c’était vraiment rien, du genre « jmélange du coca et du sky dans une bouteille en plastique, on va se promener dans la ville »… et les gens me disent que cette phrase leur parle… Au bout d’un moment j’ai réalisé que quand je disais des trucs ça parlait aux gens, je voyais que mes potes étaient fiers de ça… je représentais un certain style de vie qui n’était pas forcément mis en musique avant, c’est-à-dire un style de mec normal… et pas que dans le rap, dans la musique en général, c’est toujours des extrêmes… du superbourgeois qui nous parlait pas au truc superghetto qui ne nous correspondait pas non plus. Donc je pense que représenter dans le Hiphop c’est super important. Des groupes par exemple le 113 ou plus largement la mafia K-1 Fry ils ont énormément représenté une sorte de jeunesse à une époque et à mon avis ils ont énormément aidé à décomplexer certaines personnes.

Et pour terminer, qu’est-ce que tu peux souhaiter au Hiphop pour le futur ?
Je lui souhaite de rester longtemps au top… mais en fait le Hiphop si tu te souviens y’a beaucoup de gens qui disait que ça allait vite mourir. Mais le Hiphop ne peut pas mourir parce que c’est une musique faite de mélange donc du coup tu pourras toujours mélanger n’importe quoi et rapper dessus. C’est difficile à décrire, mais le Hiphop c’est plus une action qu’un truc figé, donc du coup je lui souhaite longue vie. Ce qui est bien c’est que ça existe sous un milliard de formes et même si certains ont encore du mal à le comprendre ça rentre de plus en plus… donc voilà, je lui souhaite de rentrer dans la culture et de continuer à faire ce qu’il fait.

Et c’est également ce que l’on peut souhaiter à Orelsan qui une fois encore à réussi à mettre tout le monde d’accord avec sa prestation live, de l’enfant à 8 ans au vieux puriste de presque 40 ans, on est tous d’accord pour dire que son concert à Festi’Neuch était juste énorme. Merci et à bientôt donc!