Une interview d’Akh a toujours quelque chose de particulier tant l’homme sait de quoi il parle et le fait bien, alors quand on a été invité à le rencontrer dans le cadre de la sortie de son excellent « Je suis en vie » on n’a pas boudé notre plaisir. Au final plus de 30 minutes de discussion, sur son album bien entendu, mais aussi la musique en général, le sampling, le Hiphop, la récupération du rap, la politique, les illuminatis… Un beau moment que l’on tient à partager avec vous pendant ces fêtes, histoire aussi de vous offrir un peu de lecture en cas d’un repas un peu trop ennuyeux ! Et parce que c’est encore le temps, on ne peut que vous conseiller de glisser un des albums d’Akh sous le sapin, agrémenté d’une place pour le concert d’Iam à l’Arena le 31 janvier si vous voulez vraiment faire plaisir.
Bonne lecture !

À l’écoute de «Je suis en vie», on a un peu l’impression d’être en face d’un résumé de tes albums précédents…
Y’a un peu de ça c’est vrai. Mais c’est aussi et surtout une prise de conscience sur la vie en général. Très souvent en interview le titre a été interprété comme un positionnement d’artiste alors que ça n’a rien à voir. C’est justement parce que d’un point de vue artistique je ne me pose plus ce genre de question que je réalise qu’en tant qu’homme cette question là est importante. Et la réponse aussi est importante, le fait de se sentir en vie et d’en apprécier tous les moments. Je pense que cela est aussi valable pour Iam, on s’est détaché de beaucoup de choses ces dernières années.

Justement, on retrouve beaucoup du dernier album d’Iam dans «Je suis en vie», particulièrement au niveau de la construction musicale, du peu de samples utilisés par exemple…
À mon grand regret! Je vais te dire pourquoi c’est mon grand regret parce que la musique que j’écoute c’est presque que de la musique à base de samples donc forcément quand j’entends les prods de Oh No, d’Alchemist, de 9th Wonder, d’Apollo Brown je suis vert parce que les mecs que j’écoute ils font des prods avec des samples, mais je ne sais pas comment ils font pour s’en tirer… j’ai demandé à Alchemist comment il faisait il m’a dit «je m’en fous». Les poursuites aux États-Unis sont un peu moins sévères qu’en France sur le sampling. En France on a quelque chose qui s’appelle le droit moral et pour lequel les condamnations peuvent être, comment dire, pas très sympathique.

Malgré tout on retrouve quand même toujours au moins une prod des gars de Just Music sur vos albums que ce soit avec Iam ou toi en solo…
Ils ne sont présents que sur une ou deux prods à mon grand regret parce que justement, eux fonctionnent avec du sample et que comme on ne peut pas tout restituer on envoie tout ça à la «clearance», mais à l’heure actuelle beaucoup ne répondent même pas, ou alors totalement hors délais… certains te demandent 15’000 euros uniquement pour entamer les discussions… Et malheureusement moi je ne peux pas dépenser tout le budget d’un album uniquement pour «clearer» 5-6 samples. Aujourd’hui sampler c’est viable pour des Jay Z ou Rick Ross parce qu’ils ont des budgets d’albums conséquents, ils peuvent payer les samples, mais c’est devenu très compliqué. Mais heureusement parfois on tombe sur des gens très cool… j’en ai eu un (de beat de Just Music) qui est arrivé trop tard, qui a été «clearé» dans la dernière ligne droite avec un sample de Blackbirds et ils étaient corrects, vraiment correct. Donc je préfère parler des gens corrects que des autres… Des gens comme Blackbirds qui font de la soul et qui sont très corrects, ils nous ont proposé quelque chose de vraiment fair et c’est important pour moi, quand il y a aussi une notion de partage, surtout quand le beatmaker est talentueux, qu’il démonte les mélodies, les remonte… Je pense qu’il devrait y avoir un minimum de législation sur le sampling. L’abus que les rappeurs ont eu par rapport à certains artistes de soul, de jazz à une certaine époque et l’abus qu’il y a maintenant de certains de ces artistes-là envers le rap… faudrait qu’on trouve un entre-deux…

Dans ce morceau il y a aussi du sample de film… une façon de renouer la tradition?
Renouer la tradition oui, mais aussi il y a tellement de phrases mythiques dans les fils de Sergio Leone, des phrases qu’on utilise depuis plus de 15 ans… ça fait partie de notre couleur, de notre background. Je le dis souvent, moi ma première expérience cinématographique ça a été «Il était une fois de l’Ouest». Je n’ai pas compris ce qui se passait la première fois que j’ai vu ça au cinéma… Je me demandais ce qui se passait, qu’est-ce que c’était ces mecs qui tuent des enfants. Mais ce n’est en fait rien de moins qu’une critique de la mafia par Sergio Leone qui utilise un pan de l’histoire américaine pour traiter d’un sujet interne à l’Italie qu’est la mafia qui élimine hommes et enfants du moment qu’ils les gênent.

Pour revenir à ton album, au niveau des bpm on sent également que les choses se passent plus lentement maintenant, tout est plus sage, plus posé.
C’est une option que j’ai prise en voulant orienter l’album vers le blues, le jazz ou la soul. Je voulais plus un album d’écoute que d’entertainment même si j’aime beaucoup le rap qui bouge, le rap qui fait danser, le rap qui ne fait pas réfléchir ne me dérange pas. Mais avec les sujets que j’avais envie d’aborder, ce que j’avais envie d’écrire sur cet album là forcément j’arrivais sur quelque chose de beaucoup plus lent. J’ai toujours aimé le rap lent en général, globalement si tu regardes, même à l’époque Iam était 6 à 7 bpm en dessous de ce que pouvait par exemple faire NTM. J’aime bien les morceaux très lents quand il y a vraiment des choses à dire. Mais peut-être qu’avec Iam et sur les prochains morceaux à venir ce sera un peu plus relevé au niveau des bpm, des tempos, des tempi, respectons le latin! (rires)

Le tempo lent te permet donc de plus facilement mettre les textes en avant.
Oui, et la musique aussi ça fait ressortir les accords. Mais pas uniquement avec nos genres de prods, par exemple si tu prends des morceaux de Rick Ross, Curren$y… Dès que tu as des instruments un peu aériens, piano électrique égrainé, on est sur des trucs très très lents. Et encore, nous avec cet album on n’est pas lent comparé à certains trucs américains qui sont presque narcotiques, c’est vraiment des morceaux de fumette. J’aime bien quelques morceaux comme ça, mais après, tout un album à 60 bpm c’est quand même dur.

On retrouve aussi un très bel hommage à une grande chanson avec ton «Étranges fruits».
Pour moi c’est super important de faire ce genre d’hommages musicaux, c’est la base de notre musique. Il faut reprendre des morceaux, à la limite parfois la chanson française ou la soul ou le jazz à une certaine époque était beaucoup plus engagé que ce que le rap l’est. Ce genre de morceau c’est très important, pour moi «Étranges fruits» c’est un morceau sur la pendaison de nos idées et de nos rêves. La pendaison de nos arguments. Qu’aujourd’hui tous les gens, de tous les bords, c’est celui qui crie le plus fort qui a raison. Si quelqu’un hurle, c’est que finalement il doit avoir raison. J’avais envie d’écrire ce morceau parce qu’il y avait des tas de choses qui me paraissaient incroyables aujourd’hui. C’est ce que je dis dans le refrain, on sait que la vie ensemble c’est possible, mais il y a beaucoup de gens de mauvaise volonté qui la rendent impossible. Parce qu’ils ont des intérêts et que ces intérêts-là… On se déguise en hommes de Dieu et on défend certains trucs, on se déguise en défenseur de vieilles valeurs françaises alors qu’on est un homme ou une femme profondément intolérants et pscht, ça passe.

On a aussi la version Akh père de famille qui parle à sa fille, un morceau très personnel…
Elle l’a découvert quand je lui ai fait écouter… c’était un moment très émouvant parce que j’ai beaucoup de discussion avec mes enfants. Le repas du soir ou du midi le week-end c’est un grand moment de discussion. J’aime bien me disputer un peu avec eux de temps en temps parce qu’ils ont des visions d’adolescents qui m’horripilent, des prises de position de fausse rébellion à 2,50 qui me fatiguent, mais c’est tout à fait normal. C’est des ados et ils doivent aussi se construire dans l’opposition. Mais j’ai surtout envie de lui dire, ce que je lui dis à elle dans ce titre est également valable pour mes garçons, qu’ils doivent se sentir libres, qu’ils ne doivent pas se sentir influencés par ce qui se dit ou se passe autour d’eux. Aujourd’hui un des problèmes c’est qu’il y a une pression sociale sur tout ce qu’on fait, systématiquement. Tu vas être observé, critiqué en bien, en mal… c’est fini cette époque où tu faisais les trucs devant 3-4 potes. Maintenant t’es dans une grande arène mondiale et ça modifie le comportement. C’est pour ça que des clashs d’oppositions, pas forcément de rap, simplement des petites histoires entre deux personnes peuvent prendre des proportions de merde parce que c’est plus du niveau de la cour d’école maintenant avec quelques personnes qui crient, mais un million de personnes qui viennent crier… et donc l’ego, tout ça est exacerbé et dans ce contexte-là j’ai envie de dire à mes enfants d’essayer de se débarrasser le plus possible de ces choses-là, de faire les choses avec leur cœur, comme votre cœur vous le dit, votre tête vous le dit. Ne soyez pas assujettis à la pression de l’entourage… mais c’est dur, c’est très très dur.

Dans ce morceau il y a aussi une prise de position par rapport à la religion, au port du voile…
Le port de voile, mais pas que ça vaut aussi pour une crête de punk… Mais si tu veux cacher tes cheveux fais-le parce que tu es intimement convaincu que tu dois le faire même si moi je pense que ce n’est pas ça qui est écrit dans le Coran «rabattez le voile sur vos épaules». Pour moi c’est l’interprétation de «cachez vos poitrines» parce qu’à l’époque ils étaient habillés comme des Grecs ou des Romains antiques… ils avaient des toges… Mais si elle le pense qu’elle le fasse pour elle-même, qu’elle ne le fasse surtout pas parce que ses copines autour d’elle le font. On revient sur cette pression sociale qui existe sur tout maintenant y compris la religion et encore plus sur le dogme, «tu dois faire ci, tu ne dois pas faire ça… ça c’est interdit, ça c’est pas interdit…».

On retrouve aussi ce même genre de dogme dans le rap finalement… «ça c’est du rap, ça c’est pas du rap…»
(soupir) Moi j’ai dépassé ça, j’ai pu être dedans à une certaine époque, mais là je n’en ai plus rien à foutre. Je défends ma culture, je viens du Hiphop. Ma culture qui est basée sur certaines valeurs, certains fondements. Le rap est devenu mainstream, la musique la plus écoutée alors comment veux-tu qu’il n’y ait pas de variantes, de différences de perceptions? Aujourd’hui il y a des gamins qui ont grandi avec le Top50, en écoutant des musiques que nous on exécraient, eux ils ont grandi avec ça et ils font du rap maintenant… donc bien sûr qu’ils mettent ce qui pour nous était de la musique de merde dans leur musique, c’est une évolution normale de la société. Je serais vraiment un vieux con si je n’arrivais pas à accepter ça, il faut toujours être dans la nuance. Je défends le Hiphop au sein du rap, notre culture Hiphop qui est devenue minoritaire dans une musique qui est devenue très vaste.

Tellement vaste que tout le monde semble essayer de monter dans le train d’ailleurs, avec des grandes théories comme quoi le rap doit être contestataire, porter un message révolutionnaire…
Mais non, le rap n’est pas une musique révolutionnaire, c’est une variante de la soul et du disco, les gens ne connaissent pas cette culture. De 1972 à 1983, il n’y a aucun texte engagé dans le rap, aucun. Aucune prise de position sociale. Il y a une prise de position dans «The Message», il y a une prise de position surtout dans la Zulu Nation, mais c’est avant tout le démembrement d’un gang particulier à New York qui comptait des milliers de membres. La Zulu Nation est créée sur une sorte de copie de préceptes coraniques pour lutter contre l’ultra violence qu’il y a à New York à cette époque. Il faut juste resituer le contexte, les gens voulaient simplement s’amuser… New York était une ville en guerre à cette période. J’ai connu New York au début des années 80 et jusqu’au début des années 90 New York c’est une ville en guerre. New York c’est l’Irak, c’est le même nombre de morts… Après c’est un vécu personnel, mais quasiment tous mes copains de l’époque sont morts, j’en ai plus un qui est vivant de cette époque-là. Je me souviens des soirées où l’on écoutait Al Green dans une chambre à Fort Greene avec des potes et je suis le seul dans la pièce à être encore vivant aujourd’hui… C’est terrible… et que les gens n’arrivent pas à comprendre que ces gens là avaient avant tout envie de simplement s’amuser à travers leur musique, qu’ils donnent un faux idéal de rocker au rap, cet idéal-là il apparaît avec Public Enemy à partir de 1986. Et à la fin des années 80, c’est là que les grands médias français commencent à absorber le rap et croient uniquement que le rap est revendicatif… Mais bordel, on avait tous des énormes chaînes en or avant, c’est un héritage de cette culture africaine…

Tout cela me fait gentiment penser à ton titre «Illuminachill»…
(rires) Il y a le clip qui arrive d’ailleurs… Une grosse surprise alors ce clip! Mais pareil, c’est un autre truc qui me fait marrer ça, j’ai vu des documentaires où carrément les mecs se prennent la tête… Mais quand tu te prends un peu la tête et fais quelques recherches, tu peux faire dire tout à n’importe quoi. Le monde est basé sur les mathématiques et la géométrie donc au bout d’un moment tu vas forcément retomber sur des grands principes. Et là encore tout récemment on faisait une interview et on parlait d’un papier sorti sur un site humoristique qui fait une fausse interview d’Iam dans laquelle on avouerait qu’on est des illuminatis. Il y a des gens qui y ont cru… Mais c’est terrible d’arriver à croire que ce genre de choses est vrai, à lire cet article et à penser que c’est vrai… voir même à reprendre le titre sans même lire la suite… Mais c’est flippant, c’est une campagne d’alphabétisation qu’il faut lancer là… les gens prennent n’importe quoi pour la vérité sur le net et le diffusent en plus. On a un gros souci là, on va devoir leur couper le WiFi pour leur sauver la vie. (rires)

Mais même avant internet, les blogs, etc. Que ce soit avec Iam ou en solo il semble que ça fait plus de 20 ans que vous tirez sur la même sonnette d’alarme.
Tristement oui… Tristement parce que peu de choses évoluent dans la société. On nous fait croire que l’on vit dans une sorte de démocratie absolue alors que l’on vote pour des personnes qui sont assujetties à de grandes multinationales. La plupart des conflits de ces 20 dernières années sont liés à l’accès à l’énergie, éventuellement parfois à l’accès à la drogue qui paie les armes qui donnent accès à l’énergie. Une fois qu’on a compris cela… je pense que ces combats-là on les a menés avec Iam depuis le début. Ce sont des combats anticolonialistes, même quand ce dernier revêt l’habit de la colonisation économique ce qui arrive très fréquemment dans beaucoup de pays africains notamment. Mais aussi des combats de proximité quand dans nos villes, dans notre pays peu de choses changent. On est obligé de chaque fois tout reprendre à zéro… à expliquer les choses… ça devient très lassant. Certains m’ont reproché de m’en prendre à Zemmour dans l’album, mais ce n’est pas que lui, c’est Finkielkraut et tous les autres… c’est toutes ces pensées véhiculées par des gens… C’est comme le discours de Dakar écrit par Guaino… relisez-le, il faut le relire ce discours il est détestable. Détestable et hautain. Et toute cette pensée-là, elle nous pollue depuis 15 ans ce qui fait que des gens diplômés issus de nos quartiers ils vont travailler à Londres parce que personne ne les engage en France… Après à l’échelle mondiale le monde n’est pas plus violent qu’avant, mais le monde communique beaucoup plus sur la violence qu’avant c’est différent. Le monde était beaucoup plus violent y’a 70 ans…

Mais tous ces messages sur la mondialisation, la démocratie… tout cela est repris par des mouvements extrêmes qui ne font qu’ajouter «un brin de haine» au vôtre, mais qui semblent plus écoutés…
C’est ça qui est flippant, on se dit que les discours que l’on tenait, qui étaient surtout basés sur la justesse et la mesure et qui pointaient ces problèmes du bout du doigt ont été repris par des gens beaucoup plus haineux que nous et transformés à une autre sauce et l’on s’aperçoit que lorsqu’on y ajoute la colère c’est beaucoup plus percutant… Mais c’est assez logique finalement, car la colère va directement te piquer dans le cœur et que les «bons sentiments» sont très mal vus en France et dans les pays occidentaux. Il faut être un méchant, un coriace, un bad boy. Alors que ces choses on les a dites pendant des années, pendant 20 ans, mais ça n’a jamais été aussi bien compris que lorsque les fachos de tous bords les reprennent… qu’ils ajoutent des histoires de complots ça fonctionne… C’est ce que je dis dans «Illuminachill»… Ils n’ont pas besoin de se faire des réunions dans des caves… C’est des milliardaires, ils n’ont pas besoin de se cacher, ils t’emmerdent… Ils prennent des décisions et te chient dessus. Les grosses compagnies pétrolières pour retourner des pays ils n’ont pas besoin de se déguiser et de boire du sang dans le crâne de Napoléon pour décider de la faire. Ils n’ont pas besoin de se cacher, ils ont leurs lobbys, ils font voter des lois. Et toutes les illusions de Hollande, de Obama… Une fois qu’ils ont accédé au pouvoir, ils se sont arrêtés aux portes des grands groupes industriels qui dirigent vraiment ce monde. Comment tu veux que les 300 familles qui possèdent les richesses mondiales se laissent faire par les gouvernements… ce n’est pas possible, c’est irréel de croire des choses comme ça.

Quelque chose qui ne semble pas changer non plus c’est le rôle que certains veulent faire porter aux rappeurs, comme s’ils devaient faire plus que les autres artistes…
Ça me rappelle cette émission où Raoult, ministre de la ville à l’époque, demande à NTM ce qu’ils font pour leur quartier… Non, mais c’est le monde à l’envers quoi, faut arrêter. Comment un ministre ose demander à un groupe de musique qu’est-ce qu’ils font pour leur quartier? C’est profondément indécent, c’est irréel. C’est à eux qu’il faut demander ce qu’ils font pour nos quartiers, c’est aux politiques qu’il faut demander ça. Qu’est-ce qu’ils font pour la scolarisation, qu’est-ce qu’ils font pour l’éducation nationale à supprimer des cours, à ne donner aucun moyen aux professeurs… à les faire débarquer dans des classes de plus de 30 enfants sans aucune formation spécifique? Dès l’école on entre dans une société qui est uniquement dans l’opposition, toujours l’opposition des forces… Les gamins perçoivent les profs comme des flics alors que ce n’est absolument pas ça. Alors c’est vrai parfois j’en ai un peu marre de parler toujours de ça, ça me fait plaisir de parler de musique, le Hiphop ça fait partie de ma vie… j’avais 13 ans à l’époque, j’en ai 46 maintenant… J’ai passé toute ma vie dans cette musique-là. Je rigole autant sur certains de ses clichés que lorsque des gens qui se prétendent du Hiphop viennent m’expliquer ce que c’est le rap… je suis mort de rire. Après on est aussi bons clients parce qu’on n’a pas la langue de bois, on n’évite pas les sujets. Mais pareil pour les questions sur le rap français… ça me saoule. On veut que je sois une surtout de papy, de père du rap français… non… j’ai trois enfants pas des millions! On veut que je donne mon avis sur le rap. Mais qu’est-ce que j’en ai à foutre? Je n’ai aucune obligation, aucun devoir. On ne devrait pas avoir à s’expliquer, à se justifier 150 fois, c’est du domaine de la non-perception de la richesse de notre culture à sa juste valeur, de ce pourquoi elle est arrivée. Elle est arrivée parce que c’était une bouffée d’oxygène dans un endroit qui était complètement sclérosé, ça a été une libération.