Interview Exclusive – Raphael Saadiq

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repreZent s’est incrusté dans les loges de Raphael Saadiq avant le concert au Docks de Lausanne le samedi 10 Octobre pour parler avec ce petit génie. Découvrez ses inspirations, son expérience avec Prince, l’importance de Stevie Wonder, sa façon d’écouter la musique, se qu’il pense de l’internet, sa collaboration avec Jay-Z et son prochain projet…

Blu:
Tu es originaire de la Bay Area (ndlr : Oakland qui se trouve à côté de San Francisco), expliques nous comment ça été de grandir dans cette region?

Raphael:
De pouvoir grandir là-bas était ce qu’il y avait de mieux pour moi car on y trouve beaucoup de styles musicaux différents. De Oakland à San Francisco en passant par Berkley à Vallejo, il y a tellement de bonnes choses à absorber, de bons musiciens dans cette région. Ca m’a donné un jeu de cartes très vaste qui m’a permis de faire mon jeu comme je l’entendais.

B:
On dit que tu as appris à jouer la basse à l’âge de 6 ans et que tu as commencé à chanter à l’âge de 12 ans, c’est vrai ?

R:
J’ai commencé en imitant les gens que je voyais à la télé comme B.B. King ou les Jackson Five avec un balai. Je chantais quelques chansons à l’église, mais ce n’était rien de sérieux. C’est seulement par la suite que j’ai arrêté de chanter pour apprendre à jouer des instruments pour de vrai.

B:
Quelles ont été tes influences, tes inspirations quand tu as vraiment commencé a faire de la musique?

R:
Je dirais des groupes de funk et des groupes de blues de mon quartier, en marchant dans la rue et en entendant des groupes jouer dans leur garage ou devant leur maison. Je voyais cette camaraderie entre eux, ça m’a toujours plu de voir des amis trainer ensemble pour jouer de la musique. Chaque fois que je voyais des gens se réunir pour faire de la musique ou danser, faire du Boogaloo, Popping… ça me donnait envie d’être avec eux.

B:
Tout ça c’est avant High School?

R:
Oui bien avant, là j’avais 8-9 ans.

B:
Au fait, tu es né en quelle année?

R:
En 66!!

B:
C’est don après la High School que tu as joué avec Prince et Shelia E pour la tournée “Parade” ?

R:
Oui juste après la High School. La “Parade Tour” a suivi Purple Rain mais on jouait encore des chansons de l’album Purple Rain. Prince était au sommet de sa carrière, il l’est toujours mais là c’était encore tout frais et il y avait encore Wendy et Lisa dans le groupe. Sur le moment je me rendais pas compte de l’importance de cette expérience mais quand j’y pense avec du recul ça m’impressionne vraiment. WAOH!! J’ai fait parti d’une des plus grosse production musicale de tout les temps et les gens vont encore en parler pendant des années.

B:
En plus Shelia E à cette époque, c’était quelque chose

R:
Shelia E aussi était au sommet à cette époque, d’ailleurs je suis encore en contact avec elle, c’est une amie…

B:
Tu a collaboré avec tout le monde, pour en citer juste quelques uns: Whitney Houston, Mary J. Blige, The Isley Brothers, The Roots, Erykah Badu, Jil Scott, Macy Gray, Angie Stone, Snoop, Devin The Dude, DJ Quik, Q-Tip, Ludacris, The Bee Gees, Musiq Soulchild, Lionel Ritchie, Amp Fiddler, John Legend, Anthony Hamilton, Earth Wind and Fire et Stevie Wonder… Qu’est-ce que Stevie t’as appris par exemple?

R:
Stevie est la bible de la musique, c’est la référence par excellence. Il y a du Stevie en moi comme il y a du Stevie dans presque tout le monde, même Prince a du Stevie en lui. Je pense que Stevie m’a appris l’importance des mélodies. Quincy Jones m’a fait remarquer ça il y a longtemps, c’était très rapide, il a juste eu le temps de me dire « J’aime tes mélodies », la mélodie est la clé d’une chanson. Depuis tout petit à la maison, il y avait des chansons de Stevie qui tournaient en boucle dans la maison. Et même aujourd’hui, je n’arriverais pas a chanter toute une chanson de Stevie parfaitement mot pour mot, par contre je connais toutes ses mélodie à 100%.

B:
Et de toutes tes collaborations avec tous ces artistes, quelle est ta plus grande fierté ?

R:
Stevie! (ndlr : sans hésitation)
Mais aussi la collaboration avec mon petit frangin D’Angelo sur sa chanson “You Should be Here” et ce que j’ai fait avec Devin The Dude.

B:
C’est marrant que tu cites Devin The Dude car il n’y a pas beaucoup de gens qui le connaisse.

R:
Devin est un gars très unique et aussi talentueux que D’Angelo. C’est un véritable chanteur, c’est un MC aussi mais le gars il chante…

B:
Et c’est un Storyteller aussi

R:
Oui tout à fait, et c’est lui qui a produit et arrangé toutes mes voix sur cette chanson.

B:
Après “Instant Vintage” et “RayRay”, qui sont 2 albums avec des petits clins d’oeil old school, tu as sorti ton 3e album solo “The Way I see it” qui a encore plus d’ambiance old school que les autres. Tu est allé encore plus loin en arrière avec cet 3e album, très retro, pourquoi ce choix?

R:
C’est de cette façon que j’ai toujours écouté la musique. C’est comme si tu étais un français qui grandi à Oakland mais qui écoutes uniquement de la musique française. Tu as toujours su t’adapter a ce qu’il se fait à Oakland mais d’un coup t’as envies de faire un album 100% français car tu écoutais que ça chez toi à la maison. Avec cet nouvel album j’ai voulu dévoiler tout ce que j’écoutais tout ce temps. C’est ce genre de chansons qui m’inspire et qui me donne envie de produire. Voilà pourquoi j’arrive a produire pour autant d’artistes différents car j’écoute les vieux originaux, la base de tout ce qu’il se fait aujourd’hui. J’ai voulu retourner en arrière car c’est cette musique là qui m’a tout appris. C’était pour montrer aux gens ce que j’aime vraiment faire.

B:
Est-ce que c’était calculé de vouloir sortir ce genre d’album à cette période pour profiter de la vague Amy Winehouse, Duffy? On sait que le timing est la clé pour réussir dans ce biz et là le timing était parfait non?

R:
En fait mon album était déjà terminé bien avant la sortie de Duffy. La photo de moi avec le costard et les lunettes qui se trouve sur la couverture de mon album date de presque 4 ans déjà. Cette photo a été prise lorsque j’étais sur scène à Oakland en train de chanter “Ain’t That Parculiar” une chanson de Marvin Gaye. C’est après avoir vu cette photo dans un théâtre à Broadway que je me suis dit que je devais faire un album qui allait avec.
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B:
Tu as aussi sorti une boite collector’s vintage pour aller avec cet album…

R:
Oui, j’ai sorti 11 vinyls 45 tours (7 inches) pour aller avec.

B:
Joli coup de marketing ça, très bien vu…
Es-tu ami avec internet et ses downloads d’aujourd’hui?

R:
Je trouve que c’est bien, les gens peuvent partager la musique. Forcement ce n’est pas génial pour les labels mais je trouve que ça va mettre en peu de d’ordre dans la musique. Si les gens aiment ce que tu fais, ils viendront te voir en concert, ils achèteront autre chose de toi, ils te suivront si t’es bon. Il y a les groupes “ringtones” et les groupes “vinyl”. Le vinyl aujourd’hui c’est comme les “sneakers”, c’est une spécialité, comme une paire de “Dunks”. Il y a ceux qui collectionne le vinyl, ils ont leur platines MK2 à la maison et ils vont frimer d’avoir tel ou tel disque en vinyl, comme un bon vieux livre.

B:
Que penses tu de l’état de la musique aujourd’hui?

R:
J’y pense pas vraiment contrairement à mes musiciens par exemple. Ils vont parler du problème de “autotune” par exemple, moi je pense que la musique finira par se trouver de toute façon. Il y a des hauts et des bas, c’est comme une relation avec le monde. Certains pensent que c’est très bien à l’heure actuelle… Moi je m’éclate, le reste m’intéresse pas trop.

B:
Y’a-t’il une chanson qui passe sans arrêt à la radio que tu n’arrive pas a te l’enlever de la tête?

R:
Pas qui passe à la radio (rires)… non, je pense que je dirais le dernier album de Jay-Z, “D.O.A” et “Empire State of Mind” si tu veux quelque chose qui passe à la radio. Sinon je dirais “Little Dragon, Constant Surprises”. Ils sont de Suède. Dope!

B:
En parlant de Jay-Z, il est aussi sur ton album, vous étiez ensemble au studio pour le remix de Oh Girl?

http://www.youtube.com/watch?v=zToJVCe-nCw&feature=related

R:
Non, j’ai envoyé le track à New York. C’est Q-Tip qui a entendu ma chanson et il m’a dit « Jay devrait être sur cette chanson » alors il l’a appelé. Ensuite j’ai parlé avec lui et il m’a dit qu’il aimait la chanson, qu’il avait déjà posé un verset dessus et qu’il allait me l’envoyer tout de suite.

B:
Tu es prêt pour le public lausannois? Toi qui est autant sur scène que dans un studio entrain de produire. T’as une préférence?

R:
J’aime être en tournée. J’aime voir les gens, pouvoir rencontrer et parler avec des nouvelles personnes voir des nouveaux points de vue. J’aime voir des sourires sur des visages dans le public. Ca m’améliore aussi comme parolier, c’est ce que je faisais avec Tony Toni Tone. Je tournais et j’enregistrer des chansons en même temps. Tourner te donnes du feeling des gens, de ce qu’ils ressentent. Je peux ensuite transmettre ça dans des paroles et faire des nouvelles chansons

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B:
En parlant de nouvelles chansons, as-tu un nouveau projet à nous annoncer?

R:
Je travaille sur un projet qui s’appellera Tha Boogie. C’est un groupe qui s’auto-produit, je m’occupe de la production exécutive. Ils viennent de Rancho Cucamonga, Los Angeles. Ils sont comment dire… différents, 2 gars et une fille. Je ne les produis pas, je finance le projet et j’essaie de les guider dans la bonne direction

B:
Dernière question, quelle est ta définition du mot repreZent?

R:
Comment je définis le mot repreZent… rester vrai avec toi même et sincère avec ce que tu penses. Savoir d’où tu viens, ne jamais reculer, pas une fois, pour personne…