Auteur-compositeur-interprète, Farhad a sorti l’année dernière son 6e projet Ici et Maintenant. Quelque part entre chanson française et RnB, l’album se rapproche de la pop urbaine actuelle. Ça, c’est pour le genre. Pour le ressenti, sa musique évoque spontanément la « Feel good music », de celles qui donnent le sourire. Mais pas que… elle peut se montrer plus mélancolique à l’image du titre « ça ne tourne pas rond », deuxième extrait clippé du projet, mis en ligne le 3 mars. Un entretien mené dans la tranquillité du sous-sol du Gavroche : Deux chaises, une table… magnéto (Serge) !

repreZent : Je trouve que ton album s’apparente à de la « Feel good music », comme il peut y avoir des « Feel good movie », des œuvres qui te donnent le sourire, qui te rendent heureux…
Farhad: C’est ce que j’essaie de faireen tant qu’humain dans ma vie de tous les jours, donc je pense qu’inconsciemment, c’est ce que j’essaie de faire dans ma musique. Avec l’âge, j’aime tirer les gens vers le haut, j’aime avoir un côté positif sur les gens. Mais ça a changé, parce qu’avant j’étais plus écorché, j’écrivais que des trucs tristes. Donc il y a un côté voulu et naturel qui est venu avec l’âge.

Les gens me disent parfois : « Il y a trop de feat », mais tu ne peux pas refuser un feat à un artiste que t’écoutais petit et qui te dit « viens on fait un titre ».

Tu parles de partage dans les interviews que tu as donnés dernièrement. Ta musique semble se rapprocher beaucoup de ça : tu donnes quelque chose, les gens prennent ce qu’ils veulent.
Ah mais je suis là-dedans. Déjà je viens de la musique classique, j’ai commencé le violon à l’âge de quatre ans. Dès que tu joues pour les gens et que tu fais des concerts, t’as qu’une envie : donner des émotions aux gens. Après la vie a fait que je suis devenu ami avec des gens que j’écoutais petit. Eux ont eu un coup de cœur pour ma musique autant que moi j’ai aimé et j’aime la leur. Il y a ce côté partage, d’ailleurs c’est peut-être pour ça qu’il y a autant de feat dans mon parcours musical. Les gens me disent parfois : « Il y a trop de feat », mais tu ne peux pas refuser un feat à un artiste que t’écoutais petit et qui te dit « viens on fait un titre ». Si j’avais quinze morceaux peut-être que j’aurais fait quinze feat et je l’aurais appelé Farhad & friends, comme disait Vinz Lee ou Geos [NDR : Lorsque Farhad est passé à Nayuno]. Pour faire des morceaux solo j’ai le temps encore, j’ai toute ma vie. Faire ces feat-là, c’est quand même pas donné à tout le monde. C’est sûr que le partage, c’est un des mots clés.

Après écoute de l’album, j’ai trouvé les textes bien écrits, intelligibles. Est-ce que tu as particulièrement travaillé cet aspect de ta musique ?
J’ai toujours aimé écrire. Les morceaux un peu plus légers sur mes anciens albums, c’était des feat. Par exemple le morceau avec Matt Houston, qui est un artiste qui aime le côté caribéen, est plus dansant. Mais quand il fallait écrire des morceaux avec Soprano ou Red.K, qui sont connus pour leur plume, tu ne peux pas arriver et dire : « Bébé, bouge ton… », ce n’est pas possible. Donc le souci de l’écriture était toujours là et ça a évolué. Aujourd’hui j’ai 35 ans, j’estime que je suis réfléchi, que je sais ce que je veux. Et en comparant, ce n’est pas pareil qu’à 20, 25 ans. Donc j’aime porter une attention à l’écriture et encore plus si les artistes écrivent bien eux-mêmes. Concernant l’articulation, je ne fais pas d’efforts particuliers, mais j’ai toujours trouvé que c’était quelque chose d’important le fait que l’on me comprenne. Sinon ce n’est pas la peine.

As-tu porté une attention à l’ordre des titres ?
Toujours, c’est hyper important. Et honnêtement, chaque album devrait être pensé un minimum autour de ça. Déjà musicalement, t’as des suites de morceaux qui vont bien ensemble, d’autres pas. Et deuxièmement, le nom des titres. Par exemple, si t’as un morceau qui s’appelle « tu sais… » et un autre avec le mot « c’est… », tu ne vas peut-être pas les mettre l’un derrière l’autre. Je suis très minutieux à ce sujet.

À l’ère du streaming, tu arrives avec 14 titres, c’est peu commun comme démarche…
J’aurais pu mettre plus de titres,mais je préfère la qualité à la quantité. Et ensuite, le projet physique l’emporte sur le projet digital pour moi. C’est comme un écrivain, je suis persuadé qu’il va vouloir sortir son livre en format physique, l’objet. Pour moi, c’était exclu que je ne fasse qu’une version digitale. Les fois où je l’ai fait, j’ai regretté ensuite de ne pas avoir le disque. Mais j’ai fait un effort, j’ai rajouté sur la version digitale le feat avec Sully [NDR : sully Sefil]. Après je ne vends pas des centaines de milliers de disques ni des dizaines de milliers de disques. Bon et puis tu touches très peu avec le streaming, il faut commencer à faire des millions d’écoutes pour avoir la rentrée d’un salaire…

Et c’est aussi un plaisir puisque des vrais liens découlent de ces rencontres : Iam m’invitent à leur concert, sont toujours bienveillants.

On en vient à parler des featuring, t’as quand même des grands noms du rap français sur l’album [NDR : Akhenaton, Shurik’n, Driver, Sully Sefil, Sinik, Faf Larage, Sir Samuel]… Parle-nous de ces collaborations.
C’est un honneur. C’est incroyable. Tous, ce sont des gens que je connais depuis 10, 15 ans. Ça été le hasard de la vie : j’ai aimé leur travail, ils ont aimé le mien et nous sommes devenus amis. Pour avoir un artiste que j’adore, j’aurais même accepté de payer si la proposition avait été raisonnable. Je n’ai pas eu à le faire et c’est un honneur. Le seul artiste à qui j’ai tendu une enveloppe c’est Sinik, que je connais beaucoup moins. Mais il ne l’a pas voulue. C’est une fierté de me dire que j’ai écouté ces gens à 10, 12 ans et ensuite d’avoir pu travailler avec eux à 30,35 ans.

Et c’est aussi un plaisir puisque des vrais liens découlent de ces rencontres : Iam m’invitent à leur concert, sont toujours bienveillants. Ils m’écrivent avant de passer en Suisse, m’offrent des places, on discute, on mange… je les vois quand je descends à Marseille… c’est vraiment incroyable de pouvoir vivre ça.

Pour revenir à la collaboration avec Akhenaton et Shurik’n, j’ai une anecdote. Il y a deux versions sur le projet : une produite de façon classique et l’autre acoustique. Quand je leur ai proposé la deuxième, ils n’étaient pas très chauds au début parce qu’ils sont hip-hop à la base. Finalement, quand je leur ai envoyé la version acoustique définitive, ils l’ont presque préférée.

Grâce à ton feat avec Sully, j’ai réécouté le maxi classique de O.S.F.A « Chasseur de rimes » [NDR : à mettre d’ailleurs dans toute bonne playlist qui se respecte]. Comment s’est faite la rencontre ?
À l’époque de Myspace. Je lui ai écrit un message en disant qu’on avait des amis en commun. On s’est échangé nos numéros et on a commencé à collaborer en 2008 sur un de mes premiers projets. Mais il avait seulement fait une interlude. Je le voyais chaque fois que je montais à Paris, mais on n’avait jamais fait de titres ensemble. Pendant douze ans on n’avait jamais pris le temps et là en quatre jours, on avait un titre pour la version digitale ; c’était fait ! C’est vraiment un mec que j’estime beaucoup.

Comptes-tu défendre cet album-là sur scène ?
Ouais, mais ça devient de plus en plus compliqué de trouver des endroits où jouer. Aller jouer gratuit, je l’ai fait pendant des années. J’ai bien aimé le faire, mais aujourd’hui comme je gagne de l’argent avec la musique, même si ce n’est pas des sommes astronomiques, j’estime quand même que c’est normal de pouvoir toucher de l’argent pour une scène.

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