Banksy, Exit through the giftshop, les Oscars et le reste…

Voilà plusieurs semaines que la nouvelle est tombée: le documentaire de Banksy, Exit through the giftshop a été nommé aux 83e Oscars dans la catégorie documentaire. De nombreux médias ont fantasmé autour de la remise du prix: Est-ce que Banksy viendra récolter sa statuette en personne, et si oui, masqué? Et si non qui le ferait? Comment? Ces questions sans réponses ont créé une euphorie sur internet et dans les médias plus mainstreams. Mais, il y a quelques jours la nouvelle est tombée: Banksy ne viendra pas à la cérémonie. Déception!

Voilà plusieurs semaines que la nouvelle est tombée: le documentaire de Banksy, Exit through the giftshop a été nommé aux 83e Oscars dans la catégorie documentaire. De nombreux médias ont fantasmé autour de la remise du prix: Est-ce que Banksy viendra récolter sa statuette en personne, et si oui, masqué? Et si non qui le ferait? Comment? Ces questions sans réponses ont créé une euphorie sur internet et dans les médias plus mainstreams. Mais, il y a quelques jours la nouvelle est tombée: Banksy ne viendra pas à la cérémonie. Déception!

Pour autant, l’artiste ne se repose pas sur ses lauriers et ne laisse pas la pression redescendre, puisque depuis deux semaines environ, les murs de Los Angeles voient fleurir des stencils inédits. A l’heure actuelle, neuf pièces ont été identifiées. Leur contenu est évidemment toujours aussi engagé. L’une d’elles apparaît à plusieurs reprises dans la ville. Si le pictogramme original ne vous est pas familier, c’est bien parce qu’il représente une situation tout à fait vernaculaire et californienne, celle d’une famille d’immigrants clandestins mexicains:

dont voici la réinterprétation du Britannique:

Et les 9 peintures, en vrac:

Mais ce n’est pas tout, car parallèlement à son activité dans les rues de L.A., l’artiste a préparé sa nomination aux Oscars en participant à un nouvel épisode des Simpsons. Cette fois-ci, pas de générique anticapitaliste, juste un clin d’oeil. Dans l’épisode 14 de la 22e saison diffusé le 20 février dernier, la famille se rend aux Oscars. Lorsqu’ils entrent dans l’auditoire qui accueille la cérémonie, on aperçoit un tag de Banksy (il semblerait qu’il y ait d’autres allusions ou apparitions de ses oeuvres dans l’épisode):

Mais une autre question subsiste et met mal à l’aise journalistes et blogueurs: si le film est nommé dans la catégorie Documentaire, est-ce que cela signifie que tout est vrai? Y compris le personnage de Mr Brainwash!? Pour ceux qui n’auraient pas encore vu le film, rappelons que ETTGS narre le parcours de Thierry Guetta, cousin de Space Invaders, passionné de caméra DV. Guetta filme les artistes les plus connus du street art. À force de suivre Shepard Fairey dans ses périples nocturnes, il décide à son tour de devenir artiste. Parallèlement à sa « carrière » il décide de monter les rushs qu’il a cumulés pendant des années et soumet un projet monté à Banksy: Life remote control. Ce dernier trouve le montage horrible (alors que le matériau de base est précieux), et décide de prendre le projet à bras le corps. À mesure du film, la carrière de Guetta/Brainwash explose et met les artistes qui l’ont soutenu dans l’embarras…

ETTGS est une dénonciation du monde de l’art et de la spéculation qui l’entoure, et entre pleinement dans la démarche de Banksy, d’où la question autour de la véracité du docu. Or, en décembre, un jeune cinéaste genevois contacte le journal Le Temps afin de donner sa version des faits. Joachim Levy accuse Banksy de lui avoir volé le film qu’il a co-réalisé avec Thierry Guetta. Huit minutes de Life remote control auraient été utilisées dans la version finale de ETTGS (dix-sept dans la version DVD) sans que le cinéaste n’ait été crédité dans le générique ou sur IMDB (et bien entendu sans toucher de bénéfices). Le journaliste du Temps avoue s’être méfié de cette déclaration (qui surgit près d’un an après la sortie du film dans les festivals indépendants) ne sachant pas si celle-ci entre dans un canular géant organisé par l’artiste britannique. Puis, les preuves fournies par Levy finissent par convaincre la rédaction du quotidien.

Après s’être établi aux États-Unis, le cinéaste genevois rencontre Guetta et ils décident de réaliser un documentaire sur le street art. En 2006, Levy le présente au marché du film de Cannes. Celui-ci suscite rapidement l’intérêt d’un distributeur australien qui veut le diffuser. Les librairies Barnes & Nobles souhaitaient offrir le film à l’achat d’une monographie consacrée à Banksy. Voyant la machine s’emballer et craignant pour son anonymat, l’artiste dit au cinéaste de ne rien accepter. Le cinéaste respecte cette requête et chacun continue son chemin, Guetta devient Mr Brainwash et Levy réalise des clips avant de rentrer en Suisse.

Et c’est là que le doute apparaît: Comment peut-on revendiquer un film aussi « épileptico expérimental » !? Autre question, si ses revendications sont vraies, pourquoi Levy n’apparaît jamais dans le docu, alors qu’on voit plusieurs fois Guetta au sein de sa famille, parmi ses amis, et même entouré de Shepard Fairey ou d’autres artistes? Comment ne pas douter de ce témoignage surgi si tardivement (le cinéaste avoue ne pas s’être aux projections en festivals…)? Si l’on pousse l’ambivalence de ETTGS à l’extrême, acceptant l’idée que Guetta est un personnage fictif, on peut facilement conclure que la déclaration de Levy est elle aussi fausse. Évidemment il existe des arguments concrets: Mr Brainwash a réalisé de la cover du dernier Best of de Madonna, Collection. Preuve de son existence? Et si en fait le mandat avait été confié à Banksy, qui en prévision de son film, l’aurait réalisé sous l’identité de Brainwash? (pourtant bien crédité dans le booklet de l’album…)

Pendant ce temps et histoire de mettre un peu plus d’eau au moulin de sa notoriété, l’artiste s’est attaqué, à l’une des plus grandes légendes du graff: Robbo. Il a repeint une pièce qui était à Regent Canal, à Camden depuis près de 25 ans, une des plus vieilles pièces de la capitale. Ne supportant pas l’affront, Robbo s’est retiré de sa retraite pour manifester son mécontentement. Depuis, Londres vit au rythme de cette guerre entre Robbo et Banksy, recouvrant tour à tour la fresque de l’autre. Deux Anglais sont même passés dernièrement rajouter un détail sur la cheminée du « salon »…

Et comme si cela ne suffisait pas, un documentaire devrait prochainement sortir: How to sell a Banksy (mais la sortie n’étant pas annoncée, s’agit-il d’un faux-trailer?)

Aujourd’hui, lorsqu’on tente une réflexion sur Banksy, on a l’impression de participer à une théorie du complot, incapable de nuancer vérité et canular. Beaucoup de questions restent en suspens, mais celle qui concerne son identité reste la plus palpitante (cf article du Daily Sunday datant de 2008). Au point, finalement de prendre le dessus sur son discours. Si sa volonté est de passer des messages anti-capitalistes, empathiques et engagés, n’est-il pas temps de révéler son identité (question certes naïve)? Car bien que cette information semble finalement assez superficielle, elle suscite à l’heure actuelle, bien plus d’intérêt que ses oeuvres (au point de trouver des informations révélant son identité, sur ebay…)!

D’une certaine manière, Banksy est devenu une sorte de Warhol contemporain? Tous les deux ont commencé par dénoncer le consumérisme et le monde de l’art et tous les deux ont fini par être adulés par ce milieu avec talent et grâce à la controverse. Suite des événements après la cérémonie de demain soir…

Maria